
La tendance se poursuit depuis plusieurs années : les conseillers d’affaires s’infiltrent dans les domaines du marketing et de la communication.
Ils sont à la recherche d’acquisitions et achètent des agences et des studios de création. Cette tendance est légèrement plus lente en Belgique que dans le reste de l’Occident. Les rachats de Kunstmaan par Accenture et de Brandfirst par Deloitte sont les seuls faits d’armes remarquables à ce jour. La tendance se dessine cependant clairement dans le reste du monde. D’après les résultats de l’Ad Age Barometer, quatre cabinets de consultance figurent désormais dans le top 10 du monde des agences : les unités opérationnelles « marketing » d’Accenture, PwC, IBM et Deloitte arrivent juste après WPP, Omnicom, Publicis Groupe, Interpublic et Dentsu dans le classement. Les consultants achètent leur droit d’entrer dans le secteur et ont bien l’intention d’y rester.
Mais comment se fait-il que des conseillers d’affaires rationnels, mais tout de même un peu linéaires parviennent soudainement à se frayer un chemin dans un secteur où la créativité était jusqu’ici le principal moteur ?
Contact avec le CEO
Premier constat : les consultants ne pénètrent pas le secteur par le chemin traditionnel du département marketing. Ils sont, pour la plupart, en contact avec le CEO ou le conseil d’administration et s’introduisent par cette porte. Ils se profilent comme des partenaires stratégiques, proposant de vastes projets de restructuration et promettant des économies de coûts. Avec la « valeur actionnariale » pour leitmotiv, ils attirent l’attention du CEO. Inutile pour eux de participer aux pitches des agences majeures ou encore de passer par le département des achats. Ils entrent directement en contact avec la direction de l’entreprise, ce qui leur confère une bonne dose d’autorité et de crédibilité. Le fait que 73 % des marketeurs aient déclaré « être ouverts aux conseillers d’affaires » dans le cadre d’une récente étude de Forrester n’a donc rien d’étonnant.
De la Communication à la Transformation Opérationnelle »
Les agences de communication, qui vendent principalement une stratégie de communication, une exécution et une mise en œuvre, utilisent un modèle de rémunération basé sur un échéancier. Les consultants se concentrent sur la stratégie d’entreprise globale, l’expérience client totale et la croissance (l’exécution est pour eux un « produit de base ») et sont, par conséquent, en mesure d’appliquer un modèle d’affaires assorti de marges plus élevées. Et plus les données et le numérique gagnent en importance dans notre secteur, plus nous marchons sur les plates-bandes des consultants. Ou comme le disait récemment un Senior Managing Director d’Accenture : « Selon nous, les marques ne se construisent plus à partir de la publicité, mais à partir d’un amalgame d’expériences client. C’est pourquoi nous nous concentrons sur ce point. » Les consultants passent du thème « publicité et communication » au thème « transformation opérationnelle ». Une stratégie qui suscite l’intérêt des marques.
Attention extrême accordée au ROI
Les marketeurs sont aujourd’hui très soucieux de la façon dont leur budget est alloué. Une grande méfiance règne dans le secteur. Ce qui ouvre une brèche pour les auditeurs et les consultants. Les marketeurs sont, en outre, extrêmement préoccupés par le Return on Investment des investissements marketing et communication. Une récente étude de PitchPoint et de l’UBA révèle qu’il s’agit précisément du point faible des agences de création, tandis que les conseillers d’affaires en font leur principale priorité. Le processus global implique une chaîne complexe, presque entièrement gérée par les consultants : données des consommateurs, connaissances, expérience client, résultats d’exploitation et indicateurs. Le chaînon de l’idée créative, qui est la préoccupation principale, mais limitée du monde des agences, se retrouve noyé au beau milieu de tous ces paramètres.
Convergence
L’essor des consultants dans notre univers reflète clairement l’évolution de l’environnement marketing. Les modèles de communication traditionnels sont menacés et les consultants arrivent avec une nouvelle approche. Qui passera la ligne d’arrivée en tête ? Les consultants seront-ils capables de devenir des talents créatifs ? Ou les agences de création se profileront-elles plus rapidement comme des conseillers d’affaires ? Une chose est sûre : les modèles d’affaires des consultants et des agences de création sont voués à converger dans un avenir proche.