Opinion de Thierry Keyen : Améliorer les systèmes de mesure

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L’UBA a identifié une série de défis qui attendent les marques et les annonceurs en 2019. L’amélioration des systèmes de mesure actuels est l’une des principales préoccupations. Le CIM joue un rôle essentiel en ce sens. Thierry Keyen, président du CIM, remet la problématique dans son contexte.

Rêvons un instant. Imaginons un marché publicitaire idéal, où le CIM aurait organisé une mesure cross-media holistique, et son corollaire, le ROCI, permettant de calculer sans erreurs un retour sur investissement média.

Immédiatement intégré dans des algorithmes d’optimisation, eux-mêmes connectés aux plateformes de programmatic buying, que d’opérations simplifiées, que de risques évités, que de mauvais choix épargnés ! Et que de métiers superflus chez les marketeers, les media-strategists, -planners et -buyers. Bien entendu, un tel outil ne peut exister sans unanimité autour des notions de return, d’efficiency et même de communication. Autant dire qu’il n’existe pas…

Depuis la naissance de la communication publicitaire, les canaux de communication proposés aux annonceurs se sont multipliés plus rapidement encore que les solutions créatives.

Tout naturellement, leurs exigences en matière de mesure ont grandi avec l’usage qu’ils faisaient des médias. Historiquement, tout était concentré dans la Presse et l’Affichage, puis sont venus le Cinéma, la Télévision, la Radio, le Web et les réseaux sociaux. Chaque média construisant une relation spécifique avec son public, l’évaluation de son audience consistait à quantifier cette relation selon des critères appropriés : lecture d’un numéro, présence devant l’écran, passage à l’aplomb d’un panneau, appel d’une page web, etc.  La fonction du média dans la chaîne publicitaire étant de véhiculer un message vers une cible, il s’agissait toujours de mesurer une opportunité de contact entre eux.

Pour ce faire, les méthodes les plus fiables ont été choisies par le CIM. Aussi différentes entre elles que l’étaient les médias. Contraignant les annonceurs à juxtaposer des audiences très diversement mesurées pour estimer la performance globale d’une campagne. Aussi longtemps que ces campagnes restaient mono- ou bi-médias, l’exercice était facile. Mais l’élargissement des media-mixes et la généralisation des déclinaisons on-line ont rendu cette situation inconfortable et insuffisamment pertinente. 

On veut aujourd’hui de la transversalité et de l’exhaustivité.

Les deux sont très difficiles à obtenir, et aucun pays n’a jusqu’à présent réussi à y répondre de façon satisfaisante. Mais pourquoi est-ce si compliqué ?

La transversalité suppose d’abord qu’on puisse observer et mesurer la relation d’un consommateur avec l’ensemble des canaux de communication qui lui sont proposés. La démarche est complexe sur un plan technique, si l’on veut capter précisément la qualité de chacun des contacts, pour en rendre une image précise. Ensuite, il s’agit d’agréger dans un même référentiel ces opportunités de contact. Peut-on raisonnablement attribuer les mêmes scores à la vision d’une affiche et d’un spot télévision, à l’écoute d’un spot radio et à la lecture d’une annonce, à un spot cinéma et à un pop-up sur le web ?

Au-delà de l’impact mémoriel, il est bien connu que chaque média construit à son rythme l’efficacité mécanique de sa répétition. Les études-silos maîtrisent bien ce phénomène par le biais des logiciels d’exploitation des données, et des courbes de distribution des contacts, plus fines que la seule accumulation des GRP. Une étude consolidée devra intégrer ces propriétés caractéristiques. 

Une mesure « holistique cross-media » ne peut exister sans un consensus autour d’un tel référentiel.

L’exhaustivité a toujours fait partie des objectifs du CIM qui s’est efforcé de mesurer chaque nouveau média adopté par les annonceurs. Jusqu’à l’arrivée d’internet, il a toujours mesuré la quasi-totalité de l’offre média. Avec le web, et surtout le web 2.0, deux obstacles se sont présentés : la faisabilité technique et l’adhésion des médias non belges. Le trafic internet est mesuré via des tags volontairement insérés par les sites mesurés. Jusqu’à présent, de grands acteurs hors frontières comme Google et Facebook ont toujours refusé d’entrer dans le jeu.

On l’a compris, résoudre la question de la transversalité permettrait de contourner ipso facto celle de l’exhaustivité, puisqu’une mesure consumer-centric saisirait les contacts des Belges avec les médias belges autant qu’étrangers. C’est donc bien dans cette direction qu’il faut orienter nos efforts.

La présence et la participation des annonceurs aux travaux des organes du CIM, et notamment ses Comités Stratégiques, sont donc essentielles aux côtés de leurs partenaires, agences et médias.

Cette opinion est spécifique à l'auteur et ne représente pas nécessairement l'opinion de UBA.

 

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