Le désintérêt croissant entre annonceurs et agences - une opinion de Geert Debruyne, CEO de fma Belgium

Geert Debruyne_MM

Cher annonceur, avez-vous lu la dernière étude d’ID Comms ? Je suppose que non, car l’étude pointe le désintérêt croissant entre annonceurs et agences. Vous, les annonceurs, vous considérez les médias dans leur globalité. Et vous, les agences, vous les considérez plus que jamais que comme des « Commodity Suppliers ». Bien sûr, ce qui est inscrit au dos du paquet de sel « 365 Delhaize » ne m’intéresse absolument pas. C’est le moins cher. Et après tout, du sel, c’est du sel, non  ?

Comment se fait-il que cette relation annonceur-agence ne tourne toujours pas rond ? En ce qui me concerne, c’est la question la plus importante à laquelle nous nous intéressons. Comment renforcer ce lien entre annonceur et agence ? La réponse apparaît toutefois noir sur blanc dans le document d’ID Comms. Et elle est à la fois choquante et confrontante. L’étude montre, en effet, clairement que « les agences n’ont qu’une faible capacité à fournir des conseils neutres et objectifs en matière de planification média » ! Pardon  ? Ai-je bien lu  ? L’agence média, dont la triple mission est d’assurer la planification, les achats et la simplification administrative, ne serait pas à la hauteur pour une de ces tâches essentielles  ? Avouez qu’il y a de quoi tomber des nues !

Et si nous nous demandions comment nous en sommes arrivés là ? Le monde des médias est certes devenu plus complexe, … Mais un expert expérimenté qui vit pour et par les médias peut gérer ces paramètres et donner des conseils avisés à ses clients. « Expérimenté », ai-je écrit plus haut… C’est justement là que le bât blesse ! La plupart des planificateurs aguerris sont insuffisamment au fait des nouveaux médias ! Le numérique, ça ne se limite pas à mettre en ligne des programmes de télévision, pour citer Peter Quaghebeur. Et la radio en ligne n’a rien à voir avec le streaming ! L’apprentissage, la formation et le l’éducation permanente, tant en interne qu’en externe, doivent devenir les moteurs de développement pour ces spécialistes média !

Il est également consternant de voir qu’un directeur d’agence est ravi lorsqu’un media planner expérimenté quitte son poste. « Ouf... Il pesait lourd sur mon payroll »… Et c’est ainsi que le cinquantenaire expérimenté est remplacé par un millénial qui semble tout savoir, peut très bien tout expliquer et ne coûte que le quart de son prédécesseur. Il semble donc que le fait que le contenu ne corresponde pas au contenant ne soit pas un problème. Jusqu’à ce que ce millénial rencontre un annonceur, spécialiste de la marque.

En fin de compte, beaucoup de ces anciens se lancent alors comme indépendants. Le beau rêve que voilà : devenir consultant média, à son propre compte. Désolé, mais ça ne marche pas ainsi ! Même en faisant abstraction des aptitudes et capacités de ces personnes, il manque un cadre, national et international. Il manque de formations, de contacts, d’interactions, d’outils, etc. Vous aurez beau être le meilleur planner de tous les temps, vous perdrez peu à peu le contact tellement essentiel avec la réalité et donc… le feeling. Loin de moi l’idée que ces consultants ne puissent pas assurer certaines tâches pour le compte de l’annonceur. Mais celles-ci ne s’articuleront pas autour du conseil stratégique et de la planification média sur le long terme ! La qualité dans le secteur des médias est un savant cocktail d’expérience et d’intelligence, d’insights et de réflexion, d’outils et de relations.

Si les agences veulent perdurer dans le temps, elles devront briser le cercle vicieux et cette tendance perverse au niveau du personnel et recommencer à investir dans la qualité humaine ! Cette tâche première qu’est le conseil média de haut niveau aux marketeers ne peut être accomplie que par des média planners et des stratèges expérimentés, bien formés, compétents et empreints de bon sens, ouverts aux évolutions et aux nouvelles tendances, qui ressentent également le besoin de comprendre ces paramètres, d’y réfléchir et osent en débattre en se focalisant encore et toujours sur le contenu !

Avouez-le, cher annonceur : les meilleurs repas sont ceux qui sont parfaitement assaisonnés… avec la juste quantité de sel. Sans sel, point de salut. Et qu’il vienne d’un paquet rouge ou blanc n’a finalement aucune importance, pourvu que ce soit du sel.

Cette opinion est spécifique à l'auteur et ne représente pas nécessairement l'opinion de UBA.

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